L'enfer du "reporting"
Qui bosse dans une multinationale ou pire dans une boite qui se prend pour une multinationale connaît le "reporting", cette façon de travailler de son chef ou de son manager.
Travailler, c'est beaucoup dire, le pauvre ne passe pas plus de 60% à faire autre chose qu'à faire cela.
Le reporting, c'est quoi, c'est remplir des tableaux, faire de l'Excel jusqu'à la nausée et remplir des indicateurs, des indicateurs sur tout, le boulot rendu à temps, bien remplir ses congés, nombre de retour d'insatisfaits dans une entreprise organisée en interne et entre service façon client-fournisseur.
Chaque service ou groupe de salarié à toujours des comptes à rendre ou à recevoir des comptes d'une autre unité, sorte de concurrence ou de commerce nauséabond au sein même de la même boite.
Francois Dupuy, sociologue, analyse parfaitement ce phénomène que je vis personnellement:
Certaines entreprises sont gérées "en nid-d'abeilles", où une organisation par métier aboutit à un cloisonnement des salariés - les uns ignorant ce que font les autres, "avec des informations qui ne remontent pas plus qu'elles ne redescendent" ; d'autres sont organisées en séquences de travail, où chacun reporte la responsabilité des échecs sur les autres. Dans tous ces cas, le pilotage effectif de l'entreprise s'est progressivement dilué.
Les indicateurs des uns font le malheur des autres et ainsi de suite, j'ai déjà vu des unités planter une autre pour ne pas avoir une gomette rouge qui plomberait les objectifs du manager.
Il décrit ainsi, témoignages à la clé, nombre d'entreprises où le pouvoir est tantôt aux mains d'"experts-métiers", tantôt aux mains de responsables syndicaux, tantôt dans celles de quelques cadres dynamiques qui, en l'absence de management réel, font leur marché dans les compétences maison pour satisfaire leurs objectifs personnels. On ne sait plus qui est responsable de quoi. Les cadres supérieurs ne comprennent plus ce qui se passe et les "pertes de valeur" s'accumulent.
Il m'arrive de bosser avec une multitude de personnes différentes pour un même sujet mais personne ne sait prendre à 100% une décision or mon boulot est dans les objectifs de mon manager qui ne pas quoi faire à part remplir ses indicateurs. Il m'est arrivé de "commander" un travail spécifique à l'étranger, il était externalisé dans un pays émergent et d'attendre un retour comme si j'attendais le devis d'un plombier alors que nous sommes la même entreprise. Nos managers sont là pour gérer au quotidien, même les entretiens annuels ne sont que des indicateurs qui fait que les employés et mêmes certains cadres ne savent plus où sont leurs places dans l'entreprise.
Sans parler de gel des salaires ou d'évolutions de carrière quasi-inexistantes, la démotivation de beaucoup dans les grandes entreprises vient de cet aspect là.
Je vous invite et je m'invite aussi à lire son bouquin Lost In Management de Francois Dupuy à ce propos:
La réalité, telle que peut l’observer le sociologue de terrain, est le plus souvent très éloignée de cette supposée dictature. S’appuyant sur dix-huit enquêtes et près de huit cents interviews, François Dupuy montre que les entreprises sont en passe de perdre le contrôle d’elles-mêmes : le pouvoir est descendu d’un ou plusieurs crans pour se disperser à la base, au niveau des intermédiaires et des exécutants. Et lorsque, poussés par une compétition grandissante, les dirigeants tentent de reprendre le contrôle par la mise en œuvre de « process » et de « reportings », le résultat est à l’inverse de l’effet escompté : plus les décisions se multiplient, moins le contrôle est grand...
A lire aussi l'excellent billet de chez Intox2007: les patrons français sont ils plus cons que les autres?
[source]
Travailler, c'est beaucoup dire, le pauvre ne passe pas plus de 60% à faire autre chose qu'à faire cela.
Le reporting, c'est quoi, c'est remplir des tableaux, faire de l'Excel jusqu'à la nausée et remplir des indicateurs, des indicateurs sur tout, le boulot rendu à temps, bien remplir ses congés, nombre de retour d'insatisfaits dans une entreprise organisée en interne et entre service façon client-fournisseur.
Chaque service ou groupe de salarié à toujours des comptes à rendre ou à recevoir des comptes d'une autre unité, sorte de concurrence ou de commerce nauséabond au sein même de la même boite.
Francois Dupuy, sociologue, analyse parfaitement ce phénomène que je vis personnellement:
Certaines entreprises sont gérées "en nid-d'abeilles", où une organisation par métier aboutit à un cloisonnement des salariés - les uns ignorant ce que font les autres, "avec des informations qui ne remontent pas plus qu'elles ne redescendent" ; d'autres sont organisées en séquences de travail, où chacun reporte la responsabilité des échecs sur les autres. Dans tous ces cas, le pilotage effectif de l'entreprise s'est progressivement dilué.
Les indicateurs des uns font le malheur des autres et ainsi de suite, j'ai déjà vu des unités planter une autre pour ne pas avoir une gomette rouge qui plomberait les objectifs du manager.
Il décrit ainsi, témoignages à la clé, nombre d'entreprises où le pouvoir est tantôt aux mains d'"experts-métiers", tantôt aux mains de responsables syndicaux, tantôt dans celles de quelques cadres dynamiques qui, en l'absence de management réel, font leur marché dans les compétences maison pour satisfaire leurs objectifs personnels. On ne sait plus qui est responsable de quoi. Les cadres supérieurs ne comprennent plus ce qui se passe et les "pertes de valeur" s'accumulent.
Il m'arrive de bosser avec une multitude de personnes différentes pour un même sujet mais personne ne sait prendre à 100% une décision or mon boulot est dans les objectifs de mon manager qui ne pas quoi faire à part remplir ses indicateurs. Il m'est arrivé de "commander" un travail spécifique à l'étranger, il était externalisé dans un pays émergent et d'attendre un retour comme si j'attendais le devis d'un plombier alors que nous sommes la même entreprise. Nos managers sont là pour gérer au quotidien, même les entretiens annuels ne sont que des indicateurs qui fait que les employés et mêmes certains cadres ne savent plus où sont leurs places dans l'entreprise.
Sans parler de gel des salaires ou d'évolutions de carrière quasi-inexistantes, la démotivation de beaucoup dans les grandes entreprises vient de cet aspect là.
Je vous invite et je m'invite aussi à lire son bouquin Lost In Management de Francois Dupuy à ce propos:
La réalité, telle que peut l’observer le sociologue de terrain, est le plus souvent très éloignée de cette supposée dictature. S’appuyant sur dix-huit enquêtes et près de huit cents interviews, François Dupuy montre que les entreprises sont en passe de perdre le contrôle d’elles-mêmes : le pouvoir est descendu d’un ou plusieurs crans pour se disperser à la base, au niveau des intermédiaires et des exécutants. Et lorsque, poussés par une compétition grandissante, les dirigeants tentent de reprendre le contrôle par la mise en œuvre de « process » et de « reportings », le résultat est à l’inverse de l’effet escompté : plus les décisions se multiplient, moins le contrôle est grand...
A lire aussi l'excellent billet de chez Intox2007: les patrons français sont ils plus cons que les autres?
[source]
Et le pire, c'est qu'en dénonçant ce qui te parait être un frein pour l'entreprise, tu passes pour un asocial, un jamais content... Reste plus qu'à se syndiquer :))
RépondreSupprimerDans ce foutoir, les syndicats aussi sont parfois perdus, je le vois tout les jours.
RépondreSupprimerEt tu n'oublieras pas de nous faire un p'tit compte-rendu de la réunion de 15h !
RépondreSupprimerJ'ai la chance de bosser dans une petite boite filiale de deux très grosses (et en plus assez intelligente pour prendre des spécialistes du reporting pour faire le reporting : une personne spécialisée évite à 15 de passer huit heures par semaines à remplir des fichiers Excel), pour lesquelles on bosse (une sorte de GIE de regroupement de moyens).
RépondreSupprimerCe qui fait qu'on maitrise nos budgets et qu'on peut envoyer chier tous les experts métiers dans tous les sens (ça fait d'ailleurs partie de notre job).
C'est un bonheur ! On passe des heures à négocier et à la fin, je dis : "OK, vous avez donné votre avis, maintenant je fais le dossier pour la direction, vous avez encore le temps de supprimer vos conneries." Tout le monde plie (l'art de mon boulot est de céder parfois).
Bref, on arrive à squizzer directement les managers intermédiaires et autres mickeys qui n'ont que seule vocation à faire croire qu'ils sont utiles en s'adressant directement aux directions...
Mais j'ai bossé avant dans de grosses structures et je me retrouve bien dans ce billet, par ailleurs excellent !
Merci Nicolas :)
RépondreSupprimerLes GIE, je connais, chez nous, ce sont des services logistiques qui sont passé en GIE et sous le management de prestataires. Le personnel a un statut spécial, je n'en sais pas plus.
"les uns ignorant ce que font les autres" L'idéal dans une entreprise à caractère mafieuse ou à l'Ethique discutable.
RépondreSupprimerRassurez vous le reporting existe...mais dans des entreprises plus petites que des multinatonales ;-)
C'est pas faut et cela existe chez nos "fleurons" du CAC40.
RépondreSupprimerTu veux dire que le "reporting" existe aussi dans les entreprises plus petites? Je me doute bien.
dans l'administrztion, c'est pareil. Ca s'appelle juste "faire des rapports" bon, à base du reporting des subordonés, bien entendu.
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